Réalisation Divine Vol 12.4

Paramahamsa Hariharananda radieux en pull rouge
Paramahamsa Hariharananda

Sommaire

Message de Baba à l’occasion du Guru Purnima

LE 24 JUILLET 2002

Chère Âme aimable et divine,

Comme chaque année, le jour du Guru Purnima est arrivé. Cette année c’est le 24 Juillet et vous êtes tous rassemblés pour célébrer ce jour prometteur et offrir votre amour et votre dévotion pour le lignage des Gourous. Dieu est le vrai Gourou. Dieu a envoyé les sages Vyasa, Shukadeva, Shankaracharya ainsi que Moïse, le Christ, Bouddha, Mahomet, etc. pour nous montrer la voie de la lumière et de l’amour. Dans notre lignée des Maîtres du Kriya Yoga, nous offrons notre amour et notre respect au Grand Gourou Babaji, à Lahiri Baba, à Shriyukteshwarji, à Sanyal Mahasaya, à Yoganandaji et à Satyanandaji. Ils sont tous avec nous pour nous aider et nous guider.

La méditation est le moyen d’éprouver la présence de Dieu et des Gourous dans chaque partie de notre corps et dans l’univers tout entier. La méditation est la vraie prière. Vous devez tous cultiver le terrain de votre corps pour en arracher la mauvaise herbe des mauvaises qualités en vivant une vie disciplinée. Vous devez y planter l’arbre de la divinité et l’arroser avec l’eau de l’amour pour en retirer le fruit de la connaissance qui vous mènera à la réalité et à la vérité. Lorsque la plante de la spiritualité sort tout juste de terre, il faut s’en occuper avec tendresse et amour. Vivez en bonne compagnie et alors les mauvaises habitudes comme la colère, l’égocentrisme et l’hypocrisie ne pourront plus vous toucher.

En ce jour très spécial, priez tous et méditez profondément. Offrez toutes vos qualités négatives aux Gourous. Les Gourous sont là pour aider le chercheur à évoluer et à grandir.

En ce jour tout spécial je prie Dieu et les Gourous qu’ils vous bénissent tous.

Humblement

Hariharananda.

Retour au Sommaire

Une lettre à une disciple en Inde

Maya Ma était une disciple de longue date du Kriya Yoga qui initiait dans la voie du Kriya en tant qu’enseignante autorisée par Baba. Elle mourut à Calcutta en Octobre 1992.

Mon aimable Mère Divine, Maya Ma,

J’ai reçu votre lettre du 22 Septembre 1978. Sa lecture m’a rendu extrêmement heureux parce que je vois que vous restez constamment au niveau divin et que vous maintenez en vous la conscience divine.

Votre méditation, votre foi et votre abandon aux Gourous vous permettent d’avoir en permanence la réalisation divine. C’est pourquoi vous percevez dans votre corps physique tout entier la présence d’Hariharananda. Dans votre lettre vous posez tant de questions complexes telles que qu’est-ce que nirguna brahma et saguna brahma et pourquoi, malgré tous ses efforts, l’être humain retombe toujours dans ses erreurs. Je vais maintenant répondre à vos questions.

Dans la Bhagavad Gita il est écrit: manusyanam sahashreshu kaschid yatati siddhaye. Il n’y a qu’une personne parmi des milliers qui cherche à atteindre la perfection parce que, avant leur naissance humaine, les gens n’ont qu’une conscience instinctive, des habitudes animales. Puis, graduellement, ils acquièrent la conscience de l’ego ce qui veut dire que leur conscience se limite aux sensations physiques, au monde matériel et au corps grossier. Et cette habitude est si profondément ancrée que même s’ils atteignent l’état de superconscience, un mauvais environnement peut les faire retomber dans l’illusion, l’imaginaire et l’erreur. Mais lorsqu’ils sont sur le plan divin ils peuvent percevoir l’âme, concevoir l’âme et réaliser l’âme et ils peuvent s’élever au dessus de l’illusion. Le remède: méditez, méditez et méditez et de façon certaine vous atteindrez le but divin.

Votre question suivante est: quelle est la différence entre saguna et nirguna brahma? Votre corps grossier, ou votre phénomène physique, est saguna brahma. Le pouvoir de Dieu y est présent. Dans la Bhagavad Gita (chapitre 7, verset 4) il est écrit que vos 24 éléments grossiers, vos éléments sensuels et vos organes actifs appartiennent au saguna brahma. Dans les Upanishads il est écrit: sarva khalidam brahma. Cela veut dire que quelque soit ce que vous voyez ou ressentez dans l’univers tout entier, le corps de l’arbre, les plantes, les insectes, les animaux, la terre, l’eau, le feu, l’air, le vide, les collines, le sable, tout est Brahma.

Dans la Bhagavad Gita (chapitre 25, versets 16 et 17) il est écrit qu’il y a trois corps. L’un d’entre eux est périssable et c’est saguna brahma, qu’on appelle le corps grossier ou le corps balabhadra. Le deuxième corps est le corps impérissable qu’on appelle akshara sharira, ou le corps subhadra. Dans la Bhagavad Gita (chapitre 15, verset 6) il est écrit: tasam brahma, mahad yonir, aham bilapradeh pita. La superconscience est mahad yonir, le corps impérissable, connu en tant que nirguna brahma, l’âme qui demeure au dedans de chaque être humain.

Le corps grossier et le corps astral tout entiers sont Brahma car il est dit dans les Upanishads ayam atma brahma, prajnanam brahma, ce qui veut dire que l’état superconscient est dans notre corps astral. Cette sagesse est Brahma. Sans le corps grossier on ne peut pas percevoir l’état superconscient. Le corps grossier est donc saguna brahma. Il est exactement comme un fil électrique dénudé Mais sans le fil on ne peut pas sentir le courant. Le fil et le courant sont tous deux Brahma. Mais dans la Bhagavad Gita il est écrit: aham bija pradah pita. Cela veut dire que Dieu est sans forme, il est simplement présent sous une forme latente dans l’univers entier. Il est le Père Suprême de l’Univers (Jagat). Dans l’Hindouisme cela s’appelle le sans forme, Jagannath. Il est Purushottam. Purush veut dire qu’il y a une conceptualisation, une super-conceptualisation qu’on peut percevoir. Dans le Christianisme, cela s’appelle le Fils de Dieu. Mais Purushottam, le Seigneur de l’Univers, Dieu, le Créateur, l’Opérateur, le Destructeur, Il est au delà de tout concept. Il est sans forme, Il imprègne tout, Il est omniscient, omnipotent, avyakta, au delà de toute expression. Dans l’Hindouisme, on dit que la Mère Divine, Durga, Rama et Krishna sont tous des dieux. Mais c’est une fausse interprétation car un dieu ne peut pas s’incarner en homme. Et Dieu ne peut pas mourir comme un homme. Ceux qui naissent et meurent ne sont que des êtres humains. Ils sont peut-être des prophètes ou le Fils de Dieu, mais il n’y a qu’un seul créateur, qu’un seul Dieu et non pas plein de dieux et de déesses.

Vous pouvez dire Durga, Rama, Krishna et Jésus. Ils sont les Fils de Dieu, le pouvoir de Dieu; ils sont des prophètes. On appelait Jésus le Fils de Dieu. Il dit: “Si vous m’aimez, si vous me suivez, alors Dieu le Père vous aimera et vous bénira et vous accordera le salut”. De même, je vous dis aussi que si nous aimons, adorons et méditons sur Durga, Rama, Krishna, alors, à coup sûr, le Père céleste, le Seigneur de l’Univers, Purushottam, le Seigneur Jagannath, vous aimera, vous bénira et comblera vos désirs, vous accordera le salut.

Dans la Bhagavad Gita il est écrit au deuxième chapitre, verset 23: nai’nam chindanti shastrani, “personne ne peut couper Dieu“. Mais Durga fut coupée en 52 morceaux et les 52 pithas (lieux de pélerinage) de l’Inde tirent leur nom de chacun de ces morceaux. Krishna aussi fut tué, par une flèche. Rama mourut également comme un être humain ordinaire. Personne ne peut donc couper Dieu, brûler Dieu, noyer Dieu. En conséquence, ce que je veux vous dire c’est que vous devriez percevoir les trois aspects de chaque déité. L’un est saguna brahma, c’est à dire prakriti brahma (phénomène naturel), un autre est nirguna brahma, c’est à dire l’état de superconscience, et le troisième est aham bija pradpita, c’est à dire Purushottam, le Seigneur de l’Univers qui est au delà de tout concept.

Les Hindous rendent un culte à un grand nombre de déités et disent que chacune d’entre elles est un dieu ou une déesse. La question se pose donc: combien de dieux y a-t’il dans l’univers? Pour les Hindous leur nombre est illimité, 330 millions de dieux et de déesses. Les Musulmans disent qu’Allah est Dieu. Les Bouddhistes disent que Bouddha est la Réalité Suprême. Combien de créateurs y a-t’il dans l’univers? De même qu’il n’y a qu’un seul Gange, qu’un seul soleil, il n’y a qu’un seul Dieu. Ce Dieu imprègne tout et est indestructible. Personne ne connaît son lieu de naissance; Il ne peut pas expirer; Il est omniprésent. Si vous le cherchez dans n’importe quelle partie de votre corps, même dans la peau, la chair, le sang, les os et la moelle osseuse, vous l’y trouverez donc. Si vous ressentez dans toutes vos activités, dans toutes vos dispositions que c’est lui qui agit, vous demeurerez en permanence dans un état de liberté et de béatitude. C’est ce qu’on appelle nityamukta avastha ou kaivalya mukti.

Par exemple l’énergie électrique d’un nombre de volts illimité présente dans une centrale électrique qui fournit du courant à toutes les petites maisons, à toutes les usines et de loin gère le travail partout pourrait être comparée à Dieu. Personne ne peut voir où est le courant électrique, mais il y a du courant partout. D’une manière contrôlée, l’électricité est extraite de la centrale par des câbles. On pourrait dire que c’est akshara brahma (le Dieu immobile, l’impérissable Soi intérieur) (Bhagavad Gita, chapitre 15). Dans les villages, chaque maison tire son électricité du câble à 125 Volts. On pourrait dire que c’est kshara brahma (le Dieu mobile, périssable). Ainsi, dans chaque corps il y a un peu de courant divin, suffisamment pour percevoir le Tout Puissant, parce qu’il est raccordé à la centrale par le câble.

Chaque corps est un corps périssable. C’est pourquoi dans la Bhagavad Gita il est dit qu’il est kshara sharita. Il grandit, se dégrade et meurt. Le corps est donc périssable; mais l’étincelle divine, les 125 Volts, est impérissable. (D’après la Loi Scientifique de la Conservation de l’Énergie, l’énergie ne se perd pas, elle ne fait que changer de forme – note de l’éditeur). Dieu produit le courant divin en permanence et, comme la société électrique, Il peut couper le courant ou supprimer le courant vital dans votre corps grossier. Le corps de tout être humain est donc périssable. Mais si vous méditez profondément, régulièrement et sincèrement, vous pouvez sentir le courant de votre propre corps et par là atteindre le courant du câble et devenir comme Rama, Krishna, Chaitanya Mahaprabhu, Ratnakar, Girish Ghosh, Vivekananda et Yogananda. Alors vous sentirez que vous êtes le corps impérissable comme tous les grands moines l’ont ressenti. Finalement, à travers le courant du câble, vous pouvez aussi atteindre la centrale et vous fondre en elle. De même, les grands moines réalisés atteignent occasionnellement le nirvikalpa samadhi. Cela veut dire qu’ils se fondent en Dieu. Cela veut dire qu’ils se fondent en Dieu, le Seigneur de l’Univers, le Purushottam.

Je vais bien. Le travail de l’ashram se poursuit sans problème et divinement. Beaucoup de gens pleins d’enthousiasme viennent se faire initier. Je suis heureux de savoir que vous dirigez des séances de Kriya Yoga avec compétence. Plus vous en dirigerez, plus vous serez divine.

Recevez tous mon affection la plus profonde et les bénédictions de Dieu et des Gourous.

Vôtre dans le service divin,

Swami H. Giri

Retour au Sommaire

Question et réponse avec Paramahamsa Hariharananda en 1978

Étudiant: Si Dieu est l’union du corps spirituel et de l’âme, pourquoi doit-on oublier le corps pour réussir ou atteindre Dieu?

Swamiji: Au départ nous avons besoin d’isolement, de calme. Si j’essaye d’apprendre l’alphabet a un garçon dans la rue, il n’arrivera à rien. Il faut trouver un endroit tranquille et là, je vais lui apprendre à écrire “A”. Je vais l’asseoir sur mes genoux et lui donner un crayon. Je vais lui donner un petit baiser et écrire “A”, “A”, “A”. Je vais guider le crayon dans sa main et recopier les lettres plusieurs fois et il pourra alors écrire et apprendre “A,B,C,D”. De cette manière il fera son apprentissage et lorsque l’apprentissage sera fini il sera capable de lire un roman, même dans une pièce pleine de monde, car il sera absorbé par le roman. Son plaisir sera intérieur et il ne prêtera pas attention au monde extérieur.

De même, notre corps est extraverti, absorbé par le monde matériel. Le monde matériel nous distrait et nous sommes accaparés par la force biologique. Cette force biologique nous entraîne en enfer. Elle ne nous laisse pas le temps d’atteindre Dieu. Mais grâce à la technique du Kriya Yoga nous pouvons contrôler cette force biologique. Il n’y a en fait qu’une seule chose à contrôler: nos poumons et notre souffle. Nous contrôlons donc notre souffle et graduellement tous ces millions de cellules pleines de mauvaises tendances se trouvent contrôlées, tous les atomes, les tissus et les muscles qui étaient absorbés dans le monde matériel.

Le diaphragme et le cœur sont agités. Lorsque vous êtes en colère vous respirez plus vite, mais si vous contrôlez votre souffle, alors, peu à peu, vous verrez que votre mental, vos pensées, votre intellect disparaissent. La sensation corporelle et la conscience du monde ont disparu. Vous ressentez alors l’âme intérieure. Vous atteignez l’état sans souffle, vous ne prêtez même plus attention à votre inhalation. Vos poumons et votre coeur et même vos voies nasales se trouvent au repos. Après cela vous pouvez percevoir le Soi intérieur, le corps invisible c’est à dire le corps qui imprègne tout.

Vous avez donc la sensation de mouvement dans l’univers entier, vous percevez le son dans l’univers entier et aussi la lumière dans l’univers entier lorsque vous êtes dans votre état méditatif. Mais si vous ouvrez les yeux, vous ne pouvez pas percevoir Dieu. Vous verrez qu’il y a des gens autour de vous et qu’ils font de beaux discours. Je vais vous donner un exemple. Un jour, l’un de mes disciples vint me voir et me dit qu’il ne disposait que de cinq minutes pour me parler. Je le remerciais et lui demandais s’il pouvait méditer quatre minutes. Il dit que non car il avait beaucoup de questions à poser. Trois minutes plus tard une belle fille entra dans la pièce. Il s’inclina et alla parler à cette femme. Puis nous parlâmes tous les trois. Il resta assis avec nous pendant une heure. D’autres filles étaient aussi arrivées et il était toujours là. A midi, les filles étaient prêtes à repartir car elles étaient venues pour la méditation. Il était venu à la même heure qu’elles et une heure plus tard il était lui aussi prêt à repartir. Je lui dis alors: “Vous avez cinq minutes pour Hariharananda et cinquante cinq minutes pour les filles.” Tout cela parce qu’il avait les yeux ouverts.

Si je lui avais dit de fermer les yeux, de rester assis calmement et de ne pas les ouvrir, il ne serait resté assis que cinq minutes. Nos cinq sens-téléphones sont nos ennemis. Notre mental, nos pensées, notre intellect et notre ego sont nos ennemis. Pendant la méditation il faut donc aller au delà de tout cela. Notre corps visible est un corps limité. Notre corps invisible est un corps illimité. Après la méditation j’ai une sensation de mouvement dans le cerveau, j’entends un son, je sens l’union du corps et de l’âme. Plus vous pratiquerez le Kriya, plus vous serez dans cet état après le Kriya. Certains boivent davantage de vin pour rester ivres plus longtemps. De même lorsqu’on médite on entre dans un état d’ivresse spirituelle, de calme et de divinité. Nous devrions le maintenir en gardant les yeux fermés. Nous devrions rester muet. Nous ne devrions pas quitter la pièce juste après la méditation. C’est paravastha, l’état de superconscience. Si vous pouvez rester assis après la médiation, vous en retirerez davantage. C’est pourquoi je vous dis de vous créer un bon environnement pour pouvoir rester assis après la méditation avec les yeux fermés.

Retour au Sommaire

Comment gagner la bataille de la vie ?

Première moitié d’une conférence de Paramahamsa Prajnanananda à Hambourg le 12/5/1998.

Om
Aayur Nashyati Pashyataam pratidinam
Yatikshayam Yauvanam
Pratyayaanthi Gatha Punarnadivasa Kaalo
Jagat bakshakahah
Lakshmi Stoya staranga Banga chapalaa
Vidhyut chalam Jeevanam
Thasmaanmaam saranaagatah saranadah
Tvam Raksha Rakshaadunaah.
Om Shanti Shanti Shanti

Oh Dieu, je réalise que la vie est éphémère. Le jour qui passe ne revient pas. Le corps vieillit. La force et la vitalité diminuent lentement. La prospérité matérielle ne dure pas. Oh Dieu, je perçois Ta présence. Donne moi la vraie sagesse de réussir ma vie. Je m’incline devant toi. Om, Amen.

La vie est une lutte. Chaque individu est un soldat, un guerrier. Pour gagner la bataille de la vie, il faut d’abord comprendre ce qu’est la vie. La vie est un voyage continu. Un jour, tous, en tant qu’âmes, nous sommes entrés dans le sein de notre mère. Nous avons vécu dans cet espace très restreint. Le corps du bébé en souffrit et essaya de sortir du corps de la mère: un grand corps essayant de sortir par un passage étroit, une lutte. Il sortit et une autre bataille s’engagea lorsque qu’il fut séparé du placenta: la bataille du souffle. Le passage de chaque inspiration est une lutte. Au cours de l’expiration il y a friction. Le souffle crée un frottement d’air continuel dans les voies respiratoires. Puis nous nous sommes mis à pleurer pour le biberon. Mais même le passage de la nourriture dans l’œsophage était une lutte. La nourriture créa une friction dans le passage étroit de l’œsophage et lorsqu’elle arriva dans l’estomac, il fallut lutter pour digérer ainsi que lorsqu’elle passa par le petit et le gros intestin avant d’être évacuée.

Au départ nous étions bébés et lentement le corps grandit. Si l’on se projette en arrière, à l’époque de notre enfance, on peut voir qu’il a fallu se battre d’une manière ou d’une autre à chaque étape de note vie: conflits intérieurs, conflits extérieurs, conflits avec des amis, conflits au travail. Ces conflits viennent de ce que toute expression externe a une semence interne. Tout d’abord les pensées produisent des paroles, puis les paroles des actions. La vie humaine est une pensée. La création divine est une pensée. Notre vie est une pensée. Vous êtes ce que vous pensez. Si une lutte s’extériorise c’est donc qu’il y avait déjà une lutte interne. Sans lutte interne, la lutte externe n’est pas possible.

Armez Vous de l’Épée de la Connaissance

Même au niveau microscopique, nous luttons chaque jour, à chaque instant. Dans ce corps humain il y a un grand nombre de microbes et de bactéries mais nous restons en bonne santé parce qu’il y a une bataille qui se livre à l’intérieur. Les bactéries utiles et les bactéries nuisibles se battent constamment. Lorsque les bactéries utiles s’affaiblissent et que les bactéries nuisibles prennent le dessus, on tombe malade. La bataille est continuelle et constante. Dans la Bible, la Bhagavad Gita et toutes les autres écritures sacrées, on parle de bataille. Pourquoi? Cette bataille n’est pas un événement extérieur; c’est la bataille que chacun livre dans sa vie personnelle. Dans la Bible, Jésus dit: “Je ne suis pas venu pour apporter la paix. Je suis venu avec une épée pour dresser le Père contre le Fils et le Fils contre le Père” L’épée est le symbole de la bataille, mais si vous regardez la vie de Jésus, vous ne le verrez jamais porter une épée. La paix ne vient pas parce qu’on la demande. La paix vient après la guerre. S’il n’y a pas de guerre, le concept de paix n’existe pas. On doit arriver à la paix en finalisant la bataille, et alors s’établit une paix continue. Dans la Bhagavad Gita le Seigneur Krishna indique quelle est cette épée dont parlait Jésus:

“tasmaad ajnaana sambhootam hritsham jnaanaasinaa ‘tmanah
chittvai ‘nam samshayam yogam aatistho ‘ttishtha bhaarata”

“Oh Bharata (Arjuna) avec l’épée de la connaissance tranche l’ignorance qui demeure en ton cœur. Libère-toi du doute et pratique le yoga de l’action et le yoga de la connaissance. N’ai pas le cœur brisé. Dresse-toi et combat ton ignorance.”

L’ignorance vient de votre cœur, le doute vient de votre cœur et il faut les trancher avec votre épée, l’épée de la sagesse. Lorsque l’ignorance aura été tranchée avec l’épée de la sagesse, lorsque vous serez établi dans la vérité, vous aurez la paix continuelle. Nous sommes maintenant armés d’une épée, l’Épée de la Connaissance, de la discrimination. Cette connaissance va vous aider à être le vainqueur ce cette bataille de la vie et je vais vous révéler comment.

De Quelle Connaissance Avons-nous Besoin Pour Cette Bataille?

Tout d’abord, je ne suis pas le corps, je suis l’âme. Je vis dans ce corps pour une courte durée. Aujourd’hui je suis dans ce corps, je n’y serai peut-être pas demain. Tout est provisoire. Le corps est provisoire et limité mais l’âme est infinie, illimitée, immortelle. C’est une autre bataille: l’âme infinie logée dans ce corps fini. Nous ne nous en rendons pas compte et nous croyons être un petit corps. Nous ne sommes pas un petit corps; nous sommes une âme, une image de Dieu. C’est la première chose que nous devons éprouver. Le mental et l’intellect sont des instruments. Lorsque nous arrivons sur le champ de bataille, nous devons porter les vêtements, l’armure et les armes nécessaires. Ce corps est un véhicule et ce mental est un instrument.

Pour livrer la bataille de la vie, un grand maître spirituel donnait quatre conseils:

  1. Battez vous contre le Diable
  2. Suivez le Maître
  3. Battez-vous jusqu’au bout
  4. Allez jusqu’à la fin du Jeu.

Lorsqu’on vit dans ce monde, on doit endurer ces frictions et ces luttes à tout moment. Imaginez une petite graine. Vous la plantez dans le sol, vous l’arrosez et quelque temps plus tard elle germe. La petite graine essaye de sortir du sol et devient une petite plante qui essaye de survivre en dépit de la pluie, du vent ou de la sécheresse. Ce processus est la croissance.

L’une des plus petites graines à ma connaissance est la graine de banian. Mais cette graine minuscule engendre l’un des plus gros arbre qui soit. Si vous allez à Calcutta vous pourrez voir dans l’un des jardins botaniques un banian qui couvre une surface d’environ mille mètres carres. La croissance de cet arbre représente un énorme combat.

Le Chien Malade

N’oubliez pas que pour mener à bien ce combat de la vie, il faut un corps solide. Sans un corps en bonne santé, il peut s’avérer difficile de réussir. Chaque fois que la maladie se présente c’est pour nous signaler que nous nous écartons du mode de vie naturel. La maladie n’est pas un obstacle, c’est une indication. Faites attention, changez votre vie.

Le corps peut bien être malade, mais je ne le suis pas. Je vais vous donner un exemple. Un homme marchait le matin avec son chien lorsqu’un ami l’aperçut et lui demanda d’où il venait. Il répondit que son chien était malade et qu’il l’avait emmené chez le docteur. Un autre jour, le même ami vit l’homme marchant seul et il lui demanda d’où il venait. L’homme répondit qu’il était malade et qu’il était allé chez le docteur.

Observez bien les deux réponses. “Mon chien est malade et je l’emmène chez le docteur” mais l’homme n’avait pas su dire “mon corps est malade et je l’emmène chez le docteur”. Il dit “je suis malade et je vais chez le docteur” car il se prenait pour son corps. C’est aussi une maladie que de se prendre pour son corps. Je suis l’âme et ce corps m’a été confié et il peut être atteint par la maladie. La maladie est un symbole, un avertissement concernant notre mode de vie pour nous inciter à le changer et à vivre en bonne santé. C’est une des conditions pour remporter la bataille de la vie.

La Force Mentale Pour Affronter l’Incertitude du Monde

Une autre chose dont nous avons besoin est la force mentale. Un faible d’esprit au tempérament changeant ne fait pas un bon guerrier. La force mentale et la détermination sont nécessaires. Dans l’ancien temps il y avait dans la partie occidentale de l’Inde un groupe de gens qu’on appelait les Rajputs. Ils constituaient la classe des guerriers et leur rôle consistait à essayer de protéger l’Inde de ses agresseurs. Si l’un d’entre eux revenait du champ de bataille avec une blessure, sa femme regardait d’abord si elle avait été infligée sur le devant du corps ou dans le dos. Si elle se trouvait sur le devant du corps, sa femme la soignait et s’occupait bien de son mari. Mais si la blessure était dans le dos, elle le jetait à la porte en disant: “Tu t’es enfui du champ de bataille. C’est pourquoi tu es blessé dans le dos.” Je vous raconte cette histoire pour vous demander d’être forts dans la bataille de la vie et de ne pas vous sauver en courant.

Les gens font tout un tas de plans. Il n’y a rien de mal à faire des plans mais souvenez vous que vos plans ne sont pas permanents. Vous avez planifié quelque chose, mais les choses vont tourner autrement. C’est une autre caractéristique de la bataille. Au cours de la bataille vous pouvez vous trouver confrontés à un problème nouveau ou à des circonstances qui n’entrent pas dans vos plans. La guerre reste toujours imprévisible. Vous pouvez faire de beaux plans pendant la nuit mais au matin la situation a changé. Nous devons accepter l’incertitude de la vie car elle crée l’opportunité de mesurer notre force intérieure et notre courage. Que faire en face d’une situation imprévue? Si nous ne savons pas utiliser nos facultés intellectuelles et mentales d’une façon rationnelle, nous serons des ratés. Beaucoup de gens pleurnichent au lieu de trouver la solution du problème. Pour avoir la force mentale nécessaire et utiliser au mieux les organes des sens dans la bataille de la vie, le guerrier doit donc être constamment en état d’alerte. Un moment d’oubli se soldera par la chute et la défaite. Soyons constamment en état d’alerte en nous posant la question: “Qui suis-je?”, “Pourquoi suis-je ici?”, “Quel est le but de ma vie?”. “Que dois-je faire à ce moment précis?”

Dans ce monde, la plupart de gens vivent au crématorium ou dans le sein de leur mère, c’est à dire qu’ils passent leur vie à penser au passé ou à l’avenir. Sur le champ de bataille il n’est pas question de se remémorer le passé ou d’essayer de prévoir ce qui va se passer dans deux jours. Il n’est question que de maintenant, le moment présent. Où êtes vous? Qu’y faites vous?

Beaucoup de gens sont physiquement quelque part mais mentalement ailleurs. Pour sortir victorieux de la bataille de la vie, le corps, le mental et l’intellect doivent être à l’unisson. Par exemple, lorsque l’on conduit une voiture, il vaut mieux se concentrer sur la conduite. Si votre corps, votre mental et votre intellect ne sont pas au même endroit sur la route, si votre mental est ailleurs, que va-t’il se passer? Juste une petite erreur peut créer des encombrements, ou causer des blessures et des pertes de vie. Pour sortir victorieux de la bataille de la vie maintenez l’unité du corps, du mental et de l’âme. “Soyez ici maintenant”. Cela ne veut pas dire que vous ne pouvez pas penser à votre passé. Cela ne veut pas dire que vous ne pouvez pas faire de plans pour le futur. Mais cela vous donnera plus d’énergie, plus de talent pour affronter le moment présent et le surmonter.

Obstacle ou Opportunité?

Souvenez vous que, sur le champ de bataille de la vie, tout problème qui se présente est passager. Aucun problème n’est permanent. Tout change. L’hiver se change en printemps, le printemps en été, l’été en automne et l’automne en hiver. Tout change, le corps change et le mental change. Tout problème est une opportunité. Ce n’est pas un obstacle. Imaginez que vous marchez sur un chemin et qu’un gros rocher vous barre la route. Si vous ne faites pas attention vous allez vous y heurter, vous blesser, vous faire mal et souffrir. Mais si vous êtes attentif vous allez grimper sur le rocher et vous vous élèverez. Tout problème offre une opportunité de grandir et non de trébucher et de pleurnicher. Les faibles se plaignent et critiquent. Mais les forts analysent et découvrent. Ne vous plaignez pas mais au contraire analysez. Découvrez ce que le problème peut entraîner de bon et de positif.

Le Commandant en Chef

Pour remporter la victoire, le combattant a besoin d’un commandant en chef. Sur le champ de bataille, si vous avez un bon commandant en chef, vous pouvez vraiment réussir. Qui est le commandant en chef? Ne continuez pas à suivre les ordres du mental. Si c’est le mental qui commande, vous allez avoir des problèmes. Un autre mot pour “mental” est “confusion”. On peut définir le mental comme étant le doute. Le mental doute de tout. Le mental aime la confusion. Le mental vit dans la confusion. Si vous êtes libre de tout doute et de toute confusion, le jeu du mental est absent. Ne suivez pas les ordres du mental. Si vous repensez à l’époque de votre vie où vous suiviez fréquemment votre mental, vous verrez que c’est l’époque où vous avez fait le plus d’erreurs.

C’est à l’intellect doué de discernement qu’on doit donner le rôle de commandant. Vous devez marcher sur le champ de bataille avec discernement. Le discernement permet une compréhension claire et une vision claire. Suivez l’intellect doué de discernement (l’intellect est la faculté humaine de décision) et vous serez un bon combattant sur le champ de bataille de la vie.

Retour au Sommaire

Vyasa et Guru Purnima

Version éditée d’une conférence de Swami Sarveshwarananda Giri à l’occasion de Gourou Purnima, le 24 Juillet 2002

Aujourd’hui, je voudrais vous entretenir de le tradition de Gourou Purnima lorsqu’elle fut célébrée pour la première fois ainsi que de sa signification. Il y a un aspect historique et un aspect méta-historique ou métaphorique comme dans la vie de tous les sages et dans les écritures. On retrouve ce double aspect dans toutes les religions. Il y a toujours un aspect historique dans la vie de n’importe quel saint. Il n’y a aucun doute qu’il ou qu’elle est né un certain jour, qu’il a accompli certaines actions, mais Dieu s’en servait comme d’un symbole. Leur vie toute entière était une métaphore pour inspirer les futures générations jusqu’à la fin des temps.

Aujourd’hui c’est donc le jour de Gourou Purnima. Purnima veut dire la pleine lune, l’illumination maximum. Et Gourou veut dire le maître spirituel
c’est à dire essentiellement le Soi. Comme l’explique Ramana Maharshi, le mental ordinaire étant incapable de percevoir Dieu en tant que soi intérieur, Dieu se manifeste sous la forme d’un soi extérieur, le gourou. Le gourou n’est là que pour vous pousser au dedans, pour vous faire découvrir le gourou intérieur et le gourou intérieur vous tire au dedans.

Gourou se compose de deux racines Sanscrites, gou et rou. Gou vient de guhyat guhayatar satta, ce qui veut dire “le pouvoir de Dieu sans forme, caché et invisible” et rou vient de tat rupam prakashayati iti ce qui veut dire “la beauté et l’éclat visibles de tout être vivant.” Le gourou est l’être de toute beauté qui nous révèle l’invisible pouvoir de Dieu, la Vérité. Gourou est aussi le nom donné à la planète Jupiter. Dans l’astrologie occidentale, Jupiter est considérée comme la planète du développement de la conscience. Dans l’astrologie védique Indienne elle est le précepteur du gourou. Gourou est aussi un adjectif qui signifie “lourd”. Jupiter est une énorme planète: elle est très lourde et use de tout son poids pour nous faire réaliser la Vérité et ne pas nous laisser nous égarer jusqu’à ce que nous l’ayons perçue.

Gourou Purnima est en fait un anniversaire, l’anniversaire de la naissance d’un sage, sage Vyasa. Vyasa est un titre et non pas un nom. Il y a eu de nombreux vyasas au cours de nombreux cycles mondiaux différents. Vyasa veut dire sagesse divine. Il a aussi une autre très belle signification. Lorsque vous prenez un cercle et que vous tracez une ligne qui passe par le centre et va d’un côte à l’autre, vous avez tracé un diamètre. C’est vyasa. Il coupe en deux. Vyasa, le gourou est celui ou celle qui coupe à travers le cercle de maya et nous nous amène au centre, à la Vérité. Une autre signification est “éditeur”, celui qui édite des livres. Et en effet, on attribue au sage Vyasa l’édition des plus importantes écritures Indiennes. Il les rassembla, les synthétisa et les divisa en quatre Védas: Rig, Yajur, Sama et Atharva. C’est grâce à lui que nous avons quatre Védas aujourd’hui: vyasyati vedan iti. Avant lui, ce n’était qu’une masse indifférenciée. Il est aussi l’auteur de nombreuses écritures. Il dicta le Mahabharata, l’énorme récit épique qui contient 100 000 versets dont la Bhagavad Gita n’est qu’une petite partie (700 versets). Il écrivit aussi la Bhagavatam qui raconte la vie de Shri Krishna.

Il y a une histoire intéressante sur la Bhagavatam. Lorsqu’il eut fini de dicter le récit épique du Mahabharata, Vyasa ne s’en sentait pas satisfait. Quelque chose le gênait. Il avait transmis la Vérité qui lui avait été révélée par Dieu mais au bout du compte il ne se sentait pas satisfait. Quelque chose manquait. Le sage Narada, une incarnation célèbre de bhakti (dévotion), vint lui rendre visite et lui dit: “Tu sais, ton Mahabharata est très beau mais il est un peu aride. Tu devrais écrire une histoire de Dieu en te plaçant davantage sous l’angle de la piété. Parle de Son charme, de Son lila (jeu), de Sa beauté, de Sa gloire et de ses attributs divins.” Le sage Vyasa s’en trouva inspiré et il écrivit la Bhagavatam qui ne parle que de Radha, Krishna, Vrindivan et de l’enfance de Krishna, de ses espiègleries et du voleur de beurre. On dirait qu’il ne s’agit que de petites histoires amusantes, mais elles révèlent des vérités profondes.

Le sage Vyasa écrivit aussi les Puranas, un mot Sanscrit qui signifie “ancien”. Ce sont donc les récits mythologiques, ce que l’occident appelle mythologie. Mais en Inde le concept de mythologie n’existe pas. Tout fait partie de l’histoire que nous devons apprendre à interpréter. Vyasa écrivit les dix huit Puranas majeurs. C’est pourquoi on appelle aussi Vyasa l’éditeur.

Vyasa n’acquit une nuit de pleine lune au mois de Juillet (ashadha-purnima). La date de la célébration de gourou purnima est établie sur le calendrier lunaire si bien qu’elle change tous les ans. C’est son anniversaire que nous célébrons, mais à travers son anniversaire nous célébrons la gloire de tous les gourous. C’est l’un des festivals religieux les plus universels, les plus globaux, au cours duquel nous ne célébrons pas que notre gourou mais aussi le gourou du gourou du gourou de notre gourou ainsi que les gourous d’autres traditions d’autres ashrams et d’autres traditions d’autres religions. C’est une vraie célébration oecuménique. Dans un grand nombre d’ashrams, en ce jour de gourou purnima, un festival est organisé, il y a des conférences, il y a des conférenciers qui viennent de toutes les religions pour parler aux disciples. Les Jaïns, les Bouddhistes, les Hindous, les Musulmans unissent l’amour de leurs esprits sur le fils de Dieu, le prophète, l’avatar, le messager tout spécial qui est venu.

La Naissance de Vyasa

La lignée de Vyasa remonte à Dieu sous son aspect créatif qu’on appelle Brahma. Le Dieu Suprême émet trois formes distinctes issues de lui-même. L’aspect créatif est Brahma, l’entretien est Vishnou, la destruction et le renouvellement est Shiva. Ce sont les mêmes forces qu’on retrouve dans la nature et en toutes choses. Des cellules naissent constamment, reçoivent la nourriture qui les entretient et sont éliminées par les lymphocytes ou les phagocytes et ainsi détruites pour laisser la place à de nouvelles cellules. Brahma, Vishnou et Shiva sont donc actifs dans tous les aspects de la nature. Tout vient du Suprême Parabrahma. Mais il se présente sous trois formes pour accomplir ses trois fonctions.

Brahma eut beaucoup d’enfants, l’un deux étant le grand sage Vasistha marié à une épouse de grande vertu et hautement spirituelle, Arundhati. A l’époque les sages n’étaient pas des moines mais des gens mariés. C’était une très ancienne tradition. Ils vivaient ensemble dans un ashram qui accueillait des étudiants. Généralement le mari enseignait et la mère s’occupait d’eux. Elle était leur mère divine. Je ne parle pas simplement de faire la cuisine mais sur tous les plans: elle nourrissait ces jeunes gens et leur enseignait la voie de l’amour.

Vasistha et Arundhati avait un fils du nom de Shakti qui signifie “pouvoir divin”. Shakti était lui-même un grand sage et avait un fils, Parashara, “flèche suprême de la Vérité”, qui devint le gourou du Seigneur Rama. Parashara fut également destiné à donner naissance à Vyasa d’une manière profondément mystique.

Un jour Parashara se promenait sur la rive du Gange, l’une des trois rivières sacrées de l’Inde, et le désir lui vint de traverser la rivière. A l’époque il n’y avait pas de pont mais des passeurs qui, pour quelques sous, transportaient les gens d’une rive à l’autre dans leur petite barque. Malheureusement il n’y avait personne à ce moment là et, debout sur la rive, il s’écria d’une voix forte: “J’ai besoin d’aller de l’autre côté. N’y a-t’il personne pour me faire traverser?”

Il y avait là une jeune femme du nom de Satyavati qu’on surnommait Matsyaghanda. Matsya veut dire poisson et ghanda veut dire odeur. Elle était la fille d’un pêcheur et elle dégageait toujours une mauvaise odeur. Elle se présenta et offrit ses services pour la traversée. Parashara accepta et ils s’installèrent dans un petit bateau à rames. Comme ils commençaient la traversée, Parashara lui dit: “Arrête de ramer ma mère, j’ai quelque chose à te dire.” Elle s’arrêta donc et il dit: “Ma mère, c’est le désir de Dieu que nous nous unissions et que tu portes en ton sein un grand sage pour la prospérité de tous les mondes à venir.”

Elle était un peu surprise. On ne fait pas la cour si rapidement et elle protesta: “Ici? Au milieu du fleuve? Tout le monde va nous voir. Qu’est-ce que mon père va penser?”

Parashara répondit: “Ne t’inquiète pas. C’est la volonté de Dieu et rien ne t’arrivera. Ta réputation sera préservée et tu rendra un service divin. Je vais créer un brouillard artificiel autour du bateau. Il sera si épais que personne ne verra rien.”

Usant de son pouvoir mystique, Parashara créa donc un brouillard dense fumeux et blanchâtre autour du bateau et ils s’unirent. Parashara ne l’abandonna pas comme ça. Il lui dit: “Grâce à ta foi et ta piété envers Dieu et à ton acceptation de sa volonté, le futur te réserve un mari merveilleux. Il s’agit d’un roi, un roi puissant.”

“Quoi? Moi, une pauvre fille de pêcheur, je vais marier un roi?”

“Oui”

“Comment vais-je le rencontrer?”

“Il viendra à toi et te demandera de traverser la rivière.”

Matsyaghanda était toujours perplexe. “Comment saurais-je que c’est lui? D’autres rois peuvent venir. Je ne le reconnaîtrai peut-être pas.”

“Lorsque quelqu’un vient te demander de traverser le fleuve, jette sept lotus dans l’eau. Si les lotus forment un cercle autour de cette personne, il s’agit de lui et il sera ton mari.”

Matsyaghanda portait maintenant en son sein l’enfant divin et lorsque l’enfant fut né, il grandit si vite qu’en quelques minutes il était déjà devenu un adulte. Il s’inclina devant sa mère et dit: “Je vais maintenant me retirer dans la forêt. Si tu as besoin de moi, pense simplement à moi et je serai là instantanément pour t’aider.”

Ce sage était Vyasa, le fils de Parashara et de Matsyaghanda. A partir de ce moment là son nom changea et on l’appela Padmaghanda, parfum de lotus (padma). On l’appelle aussi parfois Kasturigandha, parfum de musc (kasturi).

Pour découvrir celui qui était destiné à se marier avec Matsyaghanda, il faut faire un retour en arrière à l’époque qui précéda cette naissance divine et parler du roi Shantanu. Shantanu était un grand roi puissant, un guerrier courageux et un chasseur habile. Un jour, il revenait de la chasse à cheval le long du Gange lorsqu’il rencontra la femme la plus charmante qu’il n’avait jamais vue, une femme d’une grande beauté, et il tomba instantanément amoureux d’elle et lui demanda sa main.

La belle demoiselle répondit: “J’accepte mais à une condition: si je dois devenir votre femme, vous devez me promettre de ne jamais, jamais questionner mes actions. Quelque soit ce que je décide de faire, vous le respecterez et ne me poserez aucune question sur le sujet. Si vous pouvez me le promettre, je suis prête à devenir votre femme. Sinon, il n’en est pas question.”

Il jura qu’il agirait selon ses paroles.

“Très bien. Mais souvenez vous” continua la demoiselle “que si vous trahissez votre promesse je vous quitterai immédiatement et vous ne me reverrez plus jamais.”

“Cela ne se produira jamais ma belle demoiselle” jura le roi.

Cette femme était Ganga, la déesse. Elle était juste sortie du fleuve et lui avait apparu. C’était la volonté de Dieu.

Cette histoire avait en fait son origine dans une incarnation antérieure, lorsque Gangadevi et Shantanu s’étaient rencontrés à la cour de Brahma. Le roi Shantanu, dans son incarnation précédente, avait été le roi Mahabhisheka. A sa mort, du fait de sa grande vertu, il avait atteint l’un des états paradisiaques. Un jour il se rendit à la cour de Brahma à Satyaloka où la belle Gangadevi se trouvait aussi. Au cours des réjouissances célestes, une douce brise fit frémir la robe de Gangadevi. Le roi lui jeta un regard dérobé qu’elle lui retourna. Brahma les vit échanger ce regard et dans sa fureur il les condamna à se réincarner sur terre pour cette erreur. Au lieu de garder leur attention sur le paradis, ils avaient eu ce petit contact visuel concupiscent. Ils devaient donc payer. Gangadevi perdit donc momentanément sa position.

Il y a une autre histoire qui a aussi un rapport avec cet incident. Il y a huit dieux qu’on appelle les Vastus. Les Vastus sont les déités ou les gardiens des huit points cardinaux: Nord, Sud, Est, Ouest, Nord-est, Nord-ouest, Sud-est et Sud-ouest. Poussés par Dyau, tous les huit allèrent voler la vache du sage Vasistha qui comblait tous les voeux. Ayant découvert leur méfait, le sage Vasistha les maudit et les condamna à se réincarner en humains. Ils le supplièrent de leur épargner cette sentence humaine et finalement ils leur dit qu’ils naîtraient du sein de Gangadevi, elle-même condamnée à se réincarner en être humain, mais qu’ils seraient libérés immédiatement, sauf l’instigateur, Dyau, lequel aurait à vivre une longue vie d’être humain.

Gangadevi et Shantanu se rencontrèrent donc au bord du fleuve. Shantanu n’avait naturellement aucun souvenir de sa vie précédente mais Gangadevi n’avait pas perdu sa mémoire divine. Ils se marièrent et peu de temps après Gangadevi donna naissance à un fils. Par l’une des fenêtres du château, Shantanu la vit se lever immédiatement après la naissance, prendre son fils avec elle, descendre au jardin, marcher vers le Gange et le noyer. Bouleversé et horrifié Shantanu court derrière elle et au moment où il s’apprête à dire quelque chose il se souvient de sa promesse de ne jamais mettre ses actions en question sous peine de la perdre. A grand peine, il retient sa langue et ne dit rien puis suit sa femme vers le château. Peu de temps plus tard elle se retrouve à nouveau enceinte, accouche et une fois de plus emmène immédiatement son fils et le noie dans le fleuve.

Cela se produit sept fois et à chaque fois il assiste horrifié à la noyade de ses enfants au premier jour de leur vie. Lorsque pour la huitième fois Gangadevi est enceinte et que pour la huitième fois elle emmène son fils vers le fleuve et qu’elle est sur le point de le plonger dans le fleuve, Shantanu ne peut plus se retenir; il ouvre la bouche: “Je suis désolé. Je t’en prie, ne noie pas mon fils. J’ai assisté à ton manège pendant toutes ces années et ça me ronge. Je t’en prie, épargne-le.” Gangadevi le regarde calmement et dit: “Tu vois, tu n’es pas un homme de parole. Maintenant je m’en vais. J’emmène mon fils avec moi mais ne t’inquiète pas, il reviendra avec toi dans quelques années. Je vais l’éduquer. Il sera un bon fils pour toi. Mais tu ne me reverras jamais.”

Elle le quitte, entre dans le Gange et disparaît avec son fils dans les bras. Shantanu a tout perdu. De nombreuses années plus tard, il marche le long du fleuve, affligé et déprimé, ses pensées retournant constamment vers Ganga, et espérant, suppliant, priant qu’elle ressorte du fleuve et lui pardonne. Mais il voit une chose surprenante au milieu du fleuve: il y a une séparation. Le fleuve est immobilisé des deux côtés et il y a un passage libre entre les deux. Le fleuve est retenue par une série de flèches plantées dans son lit, créant deux murs comme deux barrages.

Shantanu regarde cette scène étonnante et il voit un jeune homme tenant à la main un arc et des flèches.“Est-ce que c’est toi qui as fait cela?” Il regarde ce beau garçon et il a l’impression de le connaître.

Soudain Gangadevi émerge du fleuve et dit: “C’est ton fils. Son éducation est maintenant terminée et je te le rends. Il s’appelle Devravrata.” (vrata est un “voeu” et deva signifie “divin”.) Gangadevi se fondit à nouveau dans le fleuve. Shantanu était maintenant écartelé entre le chagrin et la joie. Il avait eu une très courte vision fugitive de Gangadevi et l’avait perdue mais il avait finalement récupéré son fils et il l’embrassa. Devavrata et son père étaient maintenant réunis et Devavrata continua à grandir au sein de la maison de son père. Il était un guerrier incomparable et invincible. Il était aussi très beau, très mariable et son père se mit à penser qu’il était temps de chercher une femme pour son fils.

Un jour, il marchait le long du Gange et une odeur de musc attira son attention. Il se demandait ce que cela pouvait bien être et il suivit l’odeur à la trace et trouva une belle jeune fille assisse près d’une barque. Il la regarda et commenca à tomber amoureux d’elle malgré l’odeur. Pour engager la conversation il lui demanda de lui faire traverser le fleuve.

Elle accepta. Ils montèrent dans la barque et comme d’habitude elle jeta sept lotus dans l’eau et les sept lotus formèrent un cercle autour de la barque. Elle comprit et lui dit: “Je suis très heureuse que vous soyez venu car vous êtes celui que je suis destinée à épouser.”

Il la regarda et dit: “Comment savez-vous cela?”

“Parce que mon gourou me l’a dit,”

“Qui est votre gourou?”

“Le sage Parashara.”

Le roi lui fit part de son étonnement et lui révéla aussi son amour pour elle. Ils décidèrent d’aller immédiatement voir son père pour que le roi puisse demander sa main en mariage.

Ils traversèrent donc le fleuve et se rendirent chez son père qui n’était qu’un chef de tribu. Il accueillit son illustre invité avec tous les égards dus à son rang et écouta sa proposition avec grand intérêt mais il dit: “avant d’accepter, j’ai besoin d’en savoir un peu plus sur votre situation. Avez vous des enfants?”

“Oui, j’ai un très bon fils, Devavrata.”

Le père de Padmagandha répondit: “dans ce cas, je suis désolé, mais vous ne pouvez pas marier ma fille.”

“Pourquoi?”

“Parce que, à sa naissance, un astrologue fit son horoscope et prédit qu’elle se marierait avec un roi et que son fils serait l’héritier du trône. Mais si vous avez déjà un enfant, c’est lui qui est l’héritier du trône et vous ne pouvez donc pas l’épouser. Vous n’êtes pas le bon roi pour elle.”

Le cœur brisé une fois de plus, le roi Shantanu traversa le fleuve, retourna au palais, s’enferma dans sa chambre et refusa de manger, de boire, de dormir ou de voir qui que ce soit.

L’Horrible Chemin

Les jours passèrent. Son fils s’inquiétait beaucoup pour lui mais son père ne voulait pas le voir ni lui parler. Finalement Devavrata demanda au cocher de son père ce qui s’était passé et lui demanda de l’emmener voir le chef de village.

Le chef l’accueillit et lui demanda qui il était.

“Je suis Devavrata, le fils de Shantanu. Vous avez brisé le cœur de mon père. Je suis venu pour faire tout mon possible pour soulager sa peine. Je vous en prie, consentez au mariage de mon père et de votre fille.”

“Ce n’est pas possible.”

“Pourquoi?”

“Parce que vous, Devavrata, vous serez le prochain roi.”

“Si c’est la seule raison pour laquelle vous ne voulez pas donner votre fille à mon père, je vais faire un vœu solennel. Par tous les dieux du ciel je jure solennellement de ne jamais accéder au trône. Je renonce à mon droit au trône.”

Le petit chef le regarde et dit: “Mais que va-t’il se passer lorsque vous vous marierez et que vous aurez des enfants? Ce sera la compétition pour le trône. Je ne peux pas prendre ce risque.”

“Par tous les dieux je fais également le vœu de ne jamais me marier et de rester bramachari toute ma vie.”

“Très bien. Vous pouvez l’emmener avec vous. Je vois que vous êtes un homme d’honneur.”

A cause de ce vœu terrible, le nom de Devavrata changea et on l’appela Bhisma qui veut dire “le voeu terrible.”

Il ramena Padmagandha au château. Son père était complètement fou de joie, mais lorsqu’il apprit le sacrifice que son fils avait fait il fut anéanti: “comment as-tu pu faire une chose pareille?” “Mon père, ces choses n’ont pas d’importance pour moi. Ton bonheur est beaucoup plus important que n’importe quelle chose glorieuse sur terre.” Shantanu qui était un roi très vertueux et doué de grands pouvoirs spirituels, était si content de son fils qu’il le bénit en disant: “Je vais te faire un don précieux: tu ne mourra que lorsque tu le décidera.”

Padmagandha et Shantanu eurent deux enfants, Chitrangada qui mourut dans son enfance et Vichitravirya qui deviendra roi à la mort de Shantanu.

Bhisma était le demi-frère aîné mais il renonça volontairement au trône. Il se mit en quête de trouver trois épouses royales pour son jeune demi-frère Vivgitravirya en enlevant trois belles princesses du royaume voisin de Kashi. Les princesses, Amba, Ambika et Ambalika étaient consentantes sauf l’aînée, Amba, qui, à l’insu de Bhishma, avait déjà donné son coeur à un autre roi, Salva.

Amba confronta Bhishma après l’abduction et expliqua la situation. Se rendant compte de son erreur, Bhishma la supplia de l’excuser, conscient qu’il avait agi contre dharma et jura de la ramener à son fiancé avec tout les honneurs qui lui étaient dus. Il la ramena à Kashi en grande pompe, dans un char doré rempli d’or, d’épices et de vêtements somptueux. Mais le roi Salva ne voulait plus d’elle à la pensée que son séjour dans le château d’un autre homme l’avait rendue impure. Amba se retourna donc vers Bhishma et insista qu’il devait l’épouser pour sauver son honneur mais Bhishma ne pouvait pas accepter à cause de son voeu de brahmachari. Amba était furieuse. Il avait détruit sa vie et la situation était sans issue. Elle jura par tous les dieux de réussir un jour ou l’autre à l’entraîner dans la mort. Elle se rendit dans l’Himalaya où elle s’adonna à de longues et sévères tapas (austérités). Finalement, sous l’effet de la concentration absolue, aiguë et unidirectionnelle de son attention, le Seigneur Shiva lui apparut et lui demanda ce qu’elle voulait. Elle demanda d’être l’instrument de la mort de Bhishma. Le Seigneur Shiva lui accorda son souhait mais lui dit que ce ne serait pas dans cette vie. A cette nouvelle, Amba fit un grand feu et sauta dedans. Elle se réincarna sous la forme de Shikandin, un grand guerrier qui fut la cause indirecte de la mort de Bhishma pendant la grande guerre de Mahabharata.

La Conception de Pandu et de Dhritarashtra

Vichitravirya était marié à Ambalika mais il était impotent et n’avait pas de descendant. C’était une terrible nouvelle car elle signalait la fin de la dynastie royale et du royaume.

Satyavati se souvint alors de son premier fils, Vyasa. Elle médita sur lui et Vyasa apparut immédiatement devant elle. Vyasa avait une allure épouvantable car il s’adonnait à des austérités extrêmes dans la forêt et il était couvert de lianes, ses cheveux et sa barbe étaient en bataille et son visage était noir, couvert de cendres et de terre. Mais elle était malgré tout très heureuse de le voir et elle lui expliqua la situation, lui demandant de remplir son devoir qui, d’après les Shastra Hindous, consistait à prendre la place de son frère au cas où celui-ci était incapable de procréer. Vyasa accepta.

Lorsqu’il se présenta devant Ambika, elle fut si effrayée à la vue de ce sauvage, qu’elle ferma les yeux de peur. Plus tard, Vyasa lui dit que comme elle avait fermé les yeux, son fils naîtrait aveugle. Ce fils devait être Dhritarashtra, le roi aveugle et la cause de la guerre de Mahabharata comme le raconte la Baghavad Gita.

Puis il alla dans la pièce voisine avec Ambalika et lorsqu’elle vit Vyasa, elle ne ferma pas les yeux mais blanchit de peur. Après cela, Vyasa lui dit que comme elle avait blanchi, son fils naîtrait pâle. Ce fils serait Pandu, le père d’Arjuna, Bhima, Sahadev, Nakura et Yudhistira qu’on appelle les frères Pandava. Pandu veut dire “pâle” et aussi “instruit”.

La reine Satyavati demanda à son fils Vyasa de lui rendre un troisième petit service et elle lui envoya sa femme de chambre principale. Cette femme de chambre humble et modeste n’eut aucune réaction hostile à sa vue et Vyasa la bénit donc en disant que bien que son fils serait considéré comme issu d’une caste inférieure car elle était de la caste des femmes de chambre, il serait une incarnation de la Vérité. Il s’appellerait Vidura, c’est à dire “celui qui sait”. Il serait considéré comme une incarnation partielle de Dharma, le dieu de la Vérité. Bien qu’il n’occuperait jamais une position élevée et ne serait jamais considéré comme un candidat au trône, il serait le plus honnête du clan et c’est à lui que ses frères s’adresseraient lorsqu’ils auraient besoin d’un avis. Il serait destiné à devenir le premier ministre.

A la mort du roi Vichitravirya, son fils aîné, Dhritarashtra aurait dû accéder au trône, mais vu sa cécité congénitale, on le mit de côté et c’est le cadet, Pandu, qui devint roi. Dhritarashtra accepta son karma. Il aimait son frère mais il était peiné. Dès son ascension au trône, Pandu, comme le demandait la tradition, s’engagea dans une campagne de conquêtes, remporta la victoire sur tous les royaumes gênants des alentours et rentra couvert de gloire. La prospérité s’établit dans le royaume.

Pandu Est Maudit

Pandu éprouva alors le désir de méditer et d’étudier les écritures et de batifoler avec ses femmes. Pandu avait deux femmes, Kunti et Madri. Dhritarashtra s’était aussi marié avec la princesse Gandhari. Ils se retirèrent donc dans une forêt et Pandu nomma son frère Dhritarastra régent du royaume pour la durée de son absence.

Mais un jour, un terrible accident réduisit en pièces leur bonheur pour toujours. Pandu aimait la chasse et il vit un renne sous un buisson qu’il transperça d’une flèche. Malheureusement il n’avait pas remarqué que ce renne était en train de s’accoupler et il le tua avec son partenaire ce qui était interdit par les écritures. Pour rendre la situation encore pire, les deux rennes n’étaient pas des rennes mais deux sages engagés dans l’acte de procréation. Dès qu’ils furent mortellement blessés ils reprirent leur forme humaine: “Qu’avez vous fait? Nous ne faisions de mal à personne. Nous étions simplement engagés dans l’action sacrée de procréation et vous nous avez tués. En conséquence soyez maudit. Vous ne pourrez plus avoir de jouissance sexuelle. Si vous essayez, vous mourrez immédiatement comme nous mourrons maintenant à cause de vous.” A ces mot, ils rendirent leur dernier souffle.

Pandu était anéanti. Il refusa de retourner dans son royaume et il resta dans la forêt pour essayer de se purifier et d’expier ses péchés. Il fit savoir à ses femmes qu’il avait été maudit et qu’il se trouvait maintenant dans l’impossibilité de continuer la lignée. Les reines ne voulaient pas devenir la cause de sa mort et elles firent le voeu de ne jamais le tenter pour qu’il puisse continuer à vivre. Mais l’idée de mourir sans enfants et sans pouvoir prolonger la dynastie plongea le roi dans une morosité qui pesait lourd dans son esprit.

La reine Kunti le consola :”Mon Seigneur, ne désespérez pas. Je connais un mantra spécial grâce auquel je peux invoquer n’importe quel dieu de devenir le père de notre enfant.” Elle avait reçu ce don alors qu’elle était encore jeune fille. Elle s’était alors mise au service d’un sage qui avait apprécié le soin avec lequel la princesse faisait son travail. Elle ne croyait qu’à moitié dans ce mantra, mais elle avait décidé de l’essayer le lendemain du jour où il lui avait été donné. Elle avait prononcé les versets sacrés en ce concentrant sur Surya, le dieu soleil. Dans un éclair de lumière aveuglante, Surya se présenta à elle et dit: “Je suis ici pour réaliser ton voeu.”

“Je suis désolée, je n’étais pas sérieuse. Je ne suis encore qu’une jeune fille. Je ne suis pas mariée. Je ne suis pas prête à avoir un enfant. Je ne faisais qu’essayer le mantra. Je vous en prie retournez-vous en.”

“Non, tu m’as appelé. Il faut le faire.”

“Je serais déshonorée.”

“Il fallait y penser plus tôt.”

Elle se trouva enceinte de Surya mais réussit à cacher sa grossesse et lorsque le moment d’enfanter arriva elle le fit dans un lieu secret et finalement, mit l’enfant dans un panier et le lança à la dérive dans le fleuve avec une petite couverture. Un conducteur de chariot le trouva et l’éleva et lui donna le nom de Karna qui veut dire “oreilles”. C’était un enfant divin, l’héritier du trône, mais il ne connaissait pas son héritage royal car il était élevé par ces humbles conducteurs de chariot qu’il croyait être ses parents. Des années plus tard, il serait destiné à jouer un rôle important dans la guerre de Mahabharata.

Kunti se souvenait maintenant du don qu’elle avait reçu et usa de son pouvoir pour invoquer trois dieux. Elle invoqua d’abord Dharma, le dieu de la vérité. Elle eut un fils du nom de Yudhisthira, le plus vertueux des frères Pandava, l’aîné, qui deviendrait plus tard le roi. Puis elle invoqua Vayu, le dieu de l’air et du pouvoir immense. Elle eut un deuxième fils, Bhima, doué à la naissance d’une force surnaturelle. Il avait aussi un gros appétit et on l’appelait Bhima à la faim de loup. Elle invoqua le mantra une troisième fois en pensant au dieu du feu, Agni et elle mit au monde Arjuna, un guerrier flamboyant.

A la demande de Pandu, Kunti transmit le mantra à la reine Madri pour qu’elle puisse elle aussi porter des enfants royaux. Madri invoqua les Ashvins, les dieux jumeaux de la médecine et elle enfanta Nakula et Sahadeva.

Le roi et ses deux reines avaient retrouvé le bonheur et élevaient leurs enfants dans leur hermitage forestier. Mais la force du jeu de Maya est telle qu’un jour le roi Pandu marchant le long d’une rivière vit Madri qui s’y baignait. La concupiscence l’envahit. Il s’approcha d’elle et elle se mit à protester immédiatement lui rappelant qu’il était condamné à mourir s’ils faisaient l’amour ensemble. Mais la passion avait pris le dessus au point qu’il insista et qu’elle fut finalement forcée d’obtempérer.

Il mourut dans ses bras.

Madri était folle de désespoir, de chagrin et de culpabilité. Elle alla voir l’autre reine et lui dit qu’elle avait commis un horrible péché et qu’elle était la cause de la mort de leur mari. Elle déclara avec insistence qu’elle n’avait plus qu’à accomplir le rite du suicide par le feu (sati) pour expier son crime. Elle confia ses deux fils à Kunti et l’implora de s’occuper d’eux comme leur propre mère. Kunti promit et Madri construisit un bûcher funéraire et offrit son corps au feu rituel. La reine Kunti avait perdu sa meilleure compagne et son mari

Les Cent Fils de Dhritarashtra – Une Naissance Miraculeuse

Dhritarashtra était toujours le régent du royaume et lorsqu’il apprit la mort de son frère il en fut extrêmement attristé et promit d’élever les fils de son frère exactement comme si ils étaient les siens.

La reine Gandhari s’étaient retrouvée enceinte lorsque Pandu et ses femmes s’étaient retirés dans la forêt, mais deux ans plus tard, elle n’avait pas encore accouché et lorsqu’elle apprit que Kunti avait déjà donné naissanceà Yudhisthira, un fils “plus resplendissant que le soleil” elle entra dans un accès de rage et se frappa violemment le ventre. Elle accoucha alors d’une énorme masse de chair informe dure comme un boulet de fer. Elle s’apprêtait à la jeter lorsque Vyasa lui apparut et lui ordonna d’humecter la masse de chair avec de l’eau fraîche et de préparer cent jarres remplies de ghee (beurre clarifié). La masse éclata en cent morceaux dès que l’eau la toucha et Vyasa mit un morceau dans chaque jarre. Il dit à Gandhari que chaque morceau lui donnerait un fils. Le premier de ses fils qui naquit se mit immédiatement à braire comme un âne. De nombreux mauvais présages firent écho à cette naissance: cris de vautour, vents violents et incendies à travers le pays. Ce fils aîné était en effet né avec des qualités extrêmement mauvaises. (Il vit en nous et nous crée de nombreux problèmes: c’est Duryodhana, l’ego.)

On appela les cinq fils de Pandu les Pandavas et les cent fils de Dhritarashtra les Kauravas du nom de leur ancêtre commun le roi Kuru.

Comme vous pouvez le voir dans cette histoire, Vyasa est non seulement important en tant qu’auteur et rédacteur des écritures mais il joua aussi un rôle décisif dans le développement progressif du jeu divin. A chaque tournant du jeu, il apparaît et pousse du coude les événements pour les faire évoluer dans une direction donnée. C’est ce sage sacré, Vyasa, dont on célèbre la naissance le jour de Gourou Purnima. Dans le prochain numéro de Soul Culture, nous nous pencherons sur le sens métaphorique de cette histoire.

Retour au Sommaire

Règles de vie spirituelle à l’ashram

Par Swami Shuddhananda

Première partie d’une d’une conférence de Swami Shuddhananda Giri à l’Institut du Kriya Yoga le 15 Octobre 2001.

Je m’incline devant mon Maître encore et encore et encore et encore, continuellement.

Essayez de rester en permanence dans un état de conscience supérieure et observez vous. Les mots qui vont suivre sont des règles qui s’adressent à ceux qui sont brahmacharis, à ceux qui vivent dans un ashram, mais aussi à tous ceux qui sont sérieux au regard du progrès spirituel.

Suivez une Routine

Établissez un emploi du temps. Pensez à l’heure à laquelle vous devez vous lever le matin et aller vous coucher le soir. Établissez une routine. Méditez trois fois par jour. C’est une nécessité. La chose la plus important dans la vie d’ashram est le devoir de pratiquer. Il n’est pas bon de vous dire que vous avez du travail à faire lorsqu’il est l’heure de méditer. Bien sûr, il y a des circonstances extraordinaires ou des cas exceptionnels qui peuvent vous forcer à sauter une méditation comme par exemple lorsque Baba vous dit de faire un certain travail. Mais même si c’est votre tour de préparer le petit déjeuner, vous pouvez vous mettre au travail à cinq heures ou cinq heures et demi et à six heures et demi vous allez en classe. Ne sautez pas la méditation.

Méditez trois fois par jour parce que vous vivez ici pour votre développement spirituel. Le mental est utile dans la plupart des cas mais pas dans la vie spirituelle. Lorsque vous chercherez à atteindre un niveau supérieur de vie spirituelle, le mental ne vous aidera pas. Pendant la méditation ou la pratique spirituelle, le mental cherche à s’échapper et à s’occuper d’autre chose. Si à l’heure de la pratique spirituelle vous ne pratiquez pas et allez vous occuper d’un autre travail, c’est de la diversion, c’est que vous n’avez pas vraiment l’intention de pratiquer. Il faut faire très attention.

La Méditation Est une Nourriture Spirituelle

Supposez que vous êtes malade. J’ai vu des bramacharis qui avaient la fièvre et dont l’intérêt pour la méditationétait tel qu’au lieu de rester au lit ils venaient avec une couverture s’asseoir au fond de la salle bien qu’ils ne puissent pas formellement méditer. Vous mangez trois fois par jour. Vous devriez donc méditer trois fois par jour. Les gens disent souvent qu’ils ont trop de travail, trop de responsabilités et qu’ils n’ont pas le temps de méditer. C’est ce que les gens disent généralement. Mais personne ne dit qu’il n’a pas le temps de manger. Avez-vous entendu les gens dire qu’ils sont si occupés, qu’ils rendent tellement de services qu’ils n’ont pas le temps de manger? Nous trouvons le temps d’aller chercher de la nourriture et de la manger. De même que nous avons besoin de nourriture physique pour entretenir ce corps physique, pour entretenir le corps spirituel nous avons besoin de nourriture spirituelle: la méditation. Ne l’oublions pas.

Contrôlez Votre Sommeil

Chaque jour, régulièrement, suivez votre routine. Il faut atteindre le contrôle de son sommeil. Essayez de vous souvenir d’être debout au plus tard à cinq heure du matin et si vous vous levez plus tôt c’est encore mieux: trois heure et demi ou quatre heure est parfait. En moyenne, un brahmachari qui vit à l’ashram devrait se lever au moins deux heures avant le lever du soleil. Par exemple, si le lever du soleil est à six heure et demi, levez vous à quatre heure et demi. Lorsque vous vous levez et que vous méditez le matin pendant une heure ou deux, cela produit une impression profonde et vous met dans un état de conscience attentif pour toute la journée. Cela vous rend capable de rester dans cet état de conscience. Au début, vous mettez votre réveil à quatre heure ou quatre heure et demi mais vous avez envie de rester au lit plus longtemps. Ce genre d’attitude signifie que vous laissez vos qualités tamasiques vous contrôler et que vous n’êtes pas vraiment intéressé à devenir sattvique. Si vous voulez vous lever de bonne heure vous devriez aller vous coucher de bonne heure. Six ou sept heures de sommeil suffisent. Si vous allez vous coucher à dix heure et que vous dormez six heures, vous vous levez à quatre heure.

Au début, je vais être gentil et vous donner un peu de répit. Dormez donc sept heures, levez vous à cinq heure. Asseyez-vous sur votre lit et méditez cinq ou dix minutes maximum. Si vous êtes encore endormi, allez aux toilettes et prenez une douche. C’est bon. Ne mouillez pas vos cheveux, mais prenez une douche. Cela vous rafraîchira et vous mettra davantage dans un état sattvique. C’est important quand vous démarrez votre journée et si vous avez encore un reste de tendance tamasique, elle disparaîtra. Vous pouvez aussi aller faire une petite marche à pied qui vous aidera à regagner votre maîtrise de soi. Puis, c’est l’heure de la méditation à six heure ou six heure et demi. Je ne cherche pas à imposer mon point de vue. Ce ne sont que des avis pratiques basés sur ma propre expérience et sur ce que j’ai vu pratiqué dans les ashrams.

Essayez de lire les écritures tous les jours. Pas beaucoup. N’essayez pas d’en lire un maximum: simplement une ou deux lignes de la Bible, de la Gita, des Upanishads ou un verset des oeuvres de Shankaracharya. C’est une bonne chose car la lecture des oeuvres de Shankaracharya vous apportera plus de détachement, plus de vairagya et clarifiera vos idées. Vous en tirerez une conception claire: neti neti, neti neti, pas ceci, pas cela. Vous n’atteindrez pas la réalisation en lisant mais vous aurez les idées claires et lorsqu’on a les idées claires la pratique devient facile et vous progresserez sur la voie de la vie spirituelle. Les brahmacharis de même que les autres personnes qui vivent à l’ashram devraient rechercher à atteindre un plus grand détachement. Ceux parmi vous qui sont chefs de famille et qui vivent à l’ashram pour quelques jours devraient aussi vivre comme des brahmacharis.

Huit Choses à Éviter

D’après les écritures les brahmacharis devraient éviter huit choses: Kama, Krodha, Lobha, Sradha, Sringara kautikam, Nidra, Oti seva.

  1. Kama, désir des choses matérielles. Cela ne devrait pas exister pour un brahmachari. Tant que vous aspirerez à retirer du plaisir du monde matériel, vous ne pourrez pas avancer dans le monde spirituel. Les désirs matériels devraient donc être absents.
  2. Krodha, la colère. En permanence, évitez la colère. Lorsque vous vous sentez égocentrique et irritable et que quelqu’un fait quelque chose de mal et que vous le lui reprochez et sentez la colère monter, cette colère ne devrait pas être là. Lorsque c’est la fraternité et l’amour qui dominent et que vous voyez que tout le monde fait partie de la famille des dieux, comment pourriez vous vous mettre en colère. Vous ne pouvez pas être en colère.

La colère n’est pas toujours mauvaise, mais ce n’est pas bon d’avoir l’impression d’être des ennemis. Supposez que dans une famille il y ait de jeunes enfants et qu’ils fassent quelque chose qu’il ne faut pas faire. Les parents vont les punir, mais il n’y a pas d’inimitié. Les parents expriment leur colère envers l’enfant, mais cette colère est de l’amour et a pour but de corriger, comme la colère du gourou ou du précepteur. Mais lorsque nous sommes en colère les uns avec les autres et qu’il y a de l’inimitié, cette colère ne devrait pas être là.

Dans les Puranas, il y a l’histoire très ancienne d’un serpent pernicieux qui illustre bien comment utiliser la colère. Le serpent mordait et menaçait constamment les enfants. Un jour un moine passait par là et il vit que ce serpent était très méchant. Le moine dit au serpent d’arrêter de mordre ou de se mettre en colère. Il avait commis beaucoup de mauvaises actions dans sa vie passée et “Dans cette vie tu es donc un serpent” expliqua-t’il “ mais ne fais rien mal. Reste calme et tranquille.”

Le serpent suivit les enseignements du moine. Le lendemain, les enfants s’aperçurent que le serpent ne les menaçait plus ni ne montrait plus ses crochets venimeux et ils se mirent à lui jeter des pierres. Le serpent se souvenait de ce que le moine lui avait dit, qu’il ne devait pas se mettre en colère. Mais maintenant il souffrait. Son corps tout entier était meurtri. Quelques jours plus tard, le moine passait par là et il vit dans quel état se trouvait le serpent. Il lui demanda ce qui lui était arrivé.

Le serpent se mit à gémir: “Tu m’as dit de ne pas me mettre en colère, de ne mordre personne, de ne pas faire de mal aux autres. J’ai suivi tes conseil et maintenant regarde dans quel état je suis. J’ai les yeux au beurre noir et je suis couvert de bleus.”

Le moine éclata de rire et dit: “Je t’ai dit de ne pas te mettre en colère, de ne mordre personne mais je ne t’ai jamais dit de ne pas montrer tes crochets venimeux. Tu peux faire peur aux autres pour qu’ils ne t’attaquent pas. Faire semblant d’être en colère n’est pas vraiment de la colère.”

Il ne devrait donc pas y avoir de désir matériel ni de colère.

  1. Lobha, avidité (qui vient du désir). Lorsque nous désirons quelque chose qui nous échappe et que nous ne sommes pas capables d’acquérir, nous nous mettons à penser aux moyens de l’obtenir. Nous pouvons même aller jusqu’à le voler ou à commettre d’autres actions négatives. Évitez donc l’envie d’acquérir plus que ce dont vous avez besoin. J’ai trois ensembles vestimentaires et cela me suffit. Je me déplace beaucoup. Si j’en avais dix, qu’est ce que j’en ferais? Ces vêtements supplémentaires ne seraient qu’un fardeau. Il faudrait les faire nettoyer et j’aurais besoin de trois sacs au lieu d’un pour les transporter. Plus on possède de choses, plus on a de problèmes. Les brahmacharis devraient donc, s’ils veulent vraiment faire des progrès dans la vie spirituelle, se contenter du minimum.
  2. Sradha, le goût. C’est l’une des choses les plus importantes à éviter dans la vie d’une personne spirituelle. Le choix de nos menus repose sur leur goût. Mais ces petits plats ne sont pas nécessairement bons pour notre santé. Nous nous imaginons avoir besoin de manger des choses qui ont bon goût et nous dégustons une grande variété de plats au cours de la journée. Il faut contrôler cette habitude. Mangez trois fois par jour. Cela suffit. Ne mangez pas entre les repas. Ne mangez que lorsque vous avez faim. Buvez davantage d’eau. Si l’intervalle entre deux repas est trop long, vous pouvez grignoter quelque chose, mais ce n’est qu’une mauvaise habitude.
Retour au Sommaire

Pensées

Par Elizabeth Tackenberg, extrait d’une conférence à l’ashram de Miami, Mai 2002.

Considérons la pensée, le pouvoir de la pensée, ce qu’est la pensée, d’où elle vient et ou elle va. La pensée est réelle, presque tangible et d’une certaine façon on pourrait dire qu’elle est tangible bien qu’on ne puisse pas la toucher du doigt. Nous avons des pensées, parfois plus qu’on en voudrait. Par la pratique de la méditation, le nombre de nos pensées se réduit et l’intervalle entre les pensées augmente. Parallèlement, les pensées se renforcent. Baba répète constamment qu’il faut maintenir nos pensées dans le domaine positif, qu’il faut repérer les pensées négatives, les bloquer et ne pas les suivre dans nos actions. C’est très important et je réalise de plus en plus à quel point c’est important. Il faut faire attention à nos pensées et intercepter celles qui sont négatives avant qu’elles n’aient le temps de s’épanouir dans de longs discours. Dès qu’on se rend compte que nos pensées glissent vers le mode négatif, il faut les arrêter, faire un retour en arrière et reprendre une attitude positive. Encouragez le flot de pensées positives. Plus on médite, plus les pensées se renforcent. Si le fil de nos pensées est négatif, cette négativité va donc nous affecter au même titre que la personne ou la situation concernées.

Pour enrichir notre vie nous devrions nous efforcer d’avoir des pensées positives sur les gens et les situations. Il peut nous arriver d’avoir des idées négatives sur quelqu’un et de s’en excuser en se disant: “ Cette personne ne sait pas ce que je pense. Ce n’est donc pas un problème.” ou bien; “Cette personne ne peut pas savoir ce que je pense et ça n’a donc pas d’importance.” En fait, d’un côté, il est vrai que les gens ne sont probablement pas capables de savoir ce que vous avez en tête, mais d‘un autre, c’est faux en ce sens que la personne concernée reçoit ces pensées. Les gens sont affectés par nos pensées, qu’elles soient positives ou négatives.

Vous pouvez faire l’expérience suivante. Demandez à un ami ou un collègue de lever son bras horizontalement et tirez son bras vers le bas. En même temps, demandez à d’autres personnes de penser du bien de celui ou de celle qui essaye de garder son bras en l’air. Puis essayez avec des pensées négatives. Vous pourrez observer que les bonnes pensées donnent de la force et que les mauvaises affaiblissent.

Si l’on s’éloigne du niveau individuel et applique le même principe au niveau local, national ou global, on peut dire que les pensées d’un individu affectent le monde entier. Nous sommes entourés d’un nuage de pensées. Il y a des pensées qui nous suivent partout. Puis il y a les pensées qui nous viennent à la maison, au bureau, dans la rue. Lorsqu’on se déplace d’une ville à l’autre, on se retrouve parfois à un endroit qui dégage une impression. C’est presque palpable et cette impression est la somme des pensées des habitants. Nous semons constamment ces pensées à tous vents. Si vous vous promenez dans la rue et vous pensez simplement aux choses en général, ces pensées restent autour de vous et dans cet environnement. Lorsqu’une ville développe cette aura de pensée autour d’elle, elle se met à attirer les gens dont la pensée vibre de façon similaire, qui sont sur la même longueur d’onde. Je vois la même chose se produire ici à l’ashram. Baba est venu ici et nous fait tous méditer et comme on médite ici, cette vibration et cette pensée de paix, d’amour, d’harmonie, de tranquillité et d’évolution spirituelle s’enracine dans cette maison, dans le sol et dans les jardins. Lorsque j’arrive ici je sens que la tranquillité ne fait que s’accroître au cours des années. Les pensées qui planent au dessus de l’ashram se répandent aussi à Miami, dans le monde.

Si vous donnez à une pensée une certaine direction, elle va s’y rendre. Si par exemple vous avez un parent et vous priez pour lui, ces pensées de guérison iront directement à cette personne.

Question: Si vous arrivez dans une ville l’esprit libre de toute pensée est-il possible d’absorber aussi bien les pensées positives que les négatives?

Elizabeth Tackenberg: Oui, peut-être. Disons par exemple que j’ai un verre d’eau et que je prends ce verre d’eau et y ajoute de l’eau de la marre. Est-ce que la clarté de l’eau va changer au fur et à mesure que j’y ajoute l’eau de la marre? Oui. Et si je prends de l’eau de la marre et y ajoute de l’eau claire, va-t’elle devenir plus claire? Oui. Elle ne sera pas aussi boueuse que la marre. Ou si je prend de l’eau bleue et la mélange à de l’eau claire, l’eau claire va bleuir.

Supposons donc que vous méditez et que votre mental est complètement clair comme un verre d’eau pure. Vous entrez alors dans un magasin où il vient d’y avoir une dispute violente. Allez-vous détecter certaines de ces pensées? Très certainement. Mais, en même temps, aucune pensée dont vous ne voulez pas à un niveau ou à un autre ne peut s’imposer à vous.

Je ne peux pas vous forcer à avoir une pensée, quelle qu’elle soit. Personne ne peut vous forcer à penser quoi que ce soit. En fait, vous ne pouvez pas penser quelque chose à moins que le germe n’en soit déjà implanté en vous. En nous purifiant de plus en plus par la méditation, nos pensées s’élèvent peu à peu et se maintiennent à un niveau supérieur. Si vous entrez maintenant dans un magasin où il y a eu une dispute, vos chances d’adopter un ton vindicateur sont minimes. Vous ne vous sentirez peut-être pas à l’aise mais allez vous vous disputer avec le vendeur? Probablement pas. Mais si quelqu’un d’autre entre dans le magasin déjà énervé et en colère, il y a une bonne chance pour que cela se termine par une dispute. L’énergie est déjà là et cette personne va la capter parcequ’elle est déjà sur la même longueur d’onde. Elle va agir aussi en conséquence.

Maintenant, cela ne veut pas dire que si vous entriez rempli de sentiments d’amour et de paix vous ne pourriez pas retourner la situation. Vous pourriez entrer et engager aimablement la conversation, faire des grands sourires. Une personne a aussi le pouvoir de transformer un lieu. Vous pourriez hisser cette atmosphère argumentaire au niveau de l’amour et et de la paix pour tous.

Question: Pourriez vous nous expliquer comment renforcer notre pensée au milieu des hauts et des bas de la pratique du Kriya Yoga, comment continuer à penser positivement dans les moments les pires, lorsqu’on pratique et que rien ne semble satisfaisant, lorsqu’on a l’impression qu’on en retire rien?

Elizabeth Tackenberg: Nous passons tous par des périodes où l’on pratique régulièrement et où l’on se sent un peu découragés parce qu’on a l’impression de ne pas faire de progrès. Je me souviens d’une période où j’étais dans cet état et où Baba était justement de passage. Il me regarda. Je ne lui avait rien dit. Il me regarda et dit: “C’est lorsque que vous pensez que vous progressez le moins que vous progressez le plus.” Ne vous découragez donc pas car il se pourrait que vous soyez dans votre période de progrès la plus intense. Méditez régulièrement. Vos impressions varieront d’un jour à l’autre, mais cela n’a pas d’importance.

Question: Comment doit-on prendre une décision difficile?

Elizabeth Tackenberg: Le fait de penser qu’une décision est difficile vient de la peur qu’on a des conséquences de cette décision. Si vous allez dans cette direction vous pourriez tomber et si vous allez dans l’autre direction vous pourriez aussi tomber. Vous restez donc assis sur le mur et vous pouvez tomber d’un côté ou de l’autre. Mais au fond, ça n’a pas beaucoup d’importance. Il y a des décisions faciles et des décisions difficiles. Mais il ne faut pas perdre de vue que Dieu est présent dans toutes les situations. La décision est peut-être de faire “A” ou de faire “B” ou d’aller à “A” ou à “B” mais souvenez vous que Dieu est à la fois à “A” et à “B”. Notre but dans la vie est d’être uns avec Dieu, de connaître Dieu. Qu’on choisisse A ou B n’y change rien. Ça n’a pas d’importance. Si on laisse Dieu prendre la décision, on peut dire: “Dieu, je ne sais pas quoi faire. Je ne sais pas ce qui vaut mieux pour moi. Ce n’est vraiment pas clair. Je te laisse donc décider. Je remets la situation entre tes mains parce que je sais que tu peux prendre la décision pour moi. Je sais que tu vois tout. Je sais que tu prends à coeur mon intérêt et je sais que tu me feras savoir ce que je dois faire au moment voulu. J’abandonne donc mon inquiétude. J’abandonne mon impression de difficulté. J’abandonne mes préoccupations et mon angoisse. Je m’abandonne totalement et je sais que tout s’éclaircira au bon moment.” Et oubliez le problème. Au moment voulu, tout s’éclaircira. Ce ne sera peut-être qu’une seconde avant de prendre la décision, mais tout s’éclaircira. Et si rien d’autre ne marche, vous pourrez toujours faire pile ou face.

Il y a aussi la manière traditionnelle qui consiste à faire une liste du pour et du contre. Si je choisis “A”, il y aura tel et tel avantage. Si je choisis “A”, il y aura tel et tel inconvénient. Si je choisis “B”, il y aura tel et tel avantage et inconvénient. Vous pouvez passer en revue les différents points et leurs conséquences à court, moyen et long terme. C’est la façon traditionnelle de prendre une décision.

Parfois vous pouvez vous dire: “Bon, je vais essayer ça pour voir comment ça marche. Je peux toujours revenir en arrière.” Restez ouverts à l’idée de retourner à l’autre option. Le fait d’en parler ou de visualiser une situation peut aussi être parfois suffisant pour vous rendre compte de ce qu’elle pourraitêtre.

Question: J’ai entendu dire que lorsqu’on continue à pratiquer le Kriya et que le temps passe, les choses semblent parfois plus difficiles. Des choses vous arrivent, parfois davantage de difficultés. Sagit-il d’épreuves? Comment l’expliquez-vous?

Elizabeth Tackenberg: Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il s’agit d’épreuves. Non, ce n’est pas le mot que j’utiliserais. Cela peut venir de causes variées. Une situation est une difficulté si on la perçoit comme étant une difficulté.

Baba répète souvent: “les difficultés ne sont pas pour les difficultés mais pour apporter un changement.” Elles sont là pour notre évolution. Si je suis dans une situation que je perçois comme une difficulté, comme un problème, c’est donc qu’il y a quelque chose en moi qui n’est pas en harmonie avec Dieu ou avec mon environnement ou avec les gens qui m’entourent. Souvent cette difficulté me forcera à me plonger plus profondément dans la méditation et par là à évoluer plus vite et à la dépasser.

Parfois, je suis capable de changer de point de vue au point de ne plus percevoir cette situation comme une difficulté, comme une chose pénible. C’est parfois possible et si ce n’est pas possible, il faut méditer davantage. Méditer davantage accélérera votre évolution. Plus le souffle monte et descend le long de l’épine dorsale, plus nous évoluons rapidement. Et j’ai le sentiment que plus j’arriverai à me faire évoluer rapidement, plus vite j’échapperai à cette situation difficile.

Des situations difficiles se présenteront, cela ne fait pas l’ombre d’un doute. Baba répète souvent: “Vous aurez beaucoup de problèmes.” Fréquemment, il s’agit de responsabilités auxquelles nous devons faire face et que nous avons parfois évitées pendant longtemps. Les capacités acquises avec le temps consacré à la méditation peuvent parfois nous rendre finalement aptes à y faire face et à prendre les choses en main, a réellement résoudre le problème une fois pour toutes. Il peut donc s’agir d’une situation passée qui revient et que vous êtes maintenant capable de résoudre d’une façon très responsable parce que vous avez pratiqué la méditation pendant longtemps et que vous n’êtes plus obligé de l’éviter.

Il arrive qu’une situation continue à revenir régulièrement tous les deux ou trois ans, chaque fois avec plus de force. Cela m’est arrivé et c’était chaque fois de plus en plus fort. Je me disais: “Oh non, pas encore ce genre de situation.” Mais, finalement, je devins capable d’y faire face avec beaucoup d’amour, avec beaucoup de prière et de résoudre la situation, de la dissoudre.

Question: Pourquoi Babaji, lorsqu’il rencontra Sri Yukteswar, se sentit forcé d’aller ailleurs à cause des vibrations d’agitation, alors qu’il était si avancé?

Elizabeth Tackenberg: Il n’aimait probablement pas ça. C’est comme un adulte au milieu de l’agitation des enfants dans une cour de récréation. Imaginez le bruit et le chaos. C’est peut-être sympathique pendant quelques minutes mais au bout d’une heure, cela commence à faire trop.

On le voit bien aussi avec Baba. Il ne supporte qu’un certain volume d’interaction. Il est capable d’en supporter beaucoup mais il n’en a pas le désir.

Par ailleurs, Babaji est toujours présent mais il n’est pas toujours visible sous une forme physique. Si vous lisez l’Autobiographie d’un Yogi vous verrez qu’il est parfois visible en certaines occasions et pour certaines personnes, mais que d’autres personnes passent à côté de lui sans le voir. Tout dépend de leur niveau de conscience et de leur niveau vibratoire à ce moment particulier. Je pense que Babaji est présent même s’il n’est pas visible lorsqu’on l’appelle. En fait, dans l’Autobiographie d’un Yogi, Yogananda suggère que si vous prononcez son nom à haute voix vous recevrez sa bénédiction.

Retour au Sommaire

La Bhagavad Gita

Interprétation Métaphorique Par Paramahamsa Hariharananda

Chapitre 16, Versets 17 et 18

Verset 17

aatmasambhaavitaah stabdhaa
dhanamaanamadaanvitaaà
yajante naamayajnais te
dambhanaa vidhipoorvakam

Traduction

Vaniteux et entêtés, ennivrés par les richesses et les honneurs, ils célèbrent yajnas (rites sacrificiels), seulement de nom et avec hypocrisie, sans suivre les rites sacrés.

Interprétation Métaphorique

Les gens qui sont spirituels sont extrêmement humbles et dénués d’ego et de vanité. Ils font tout pour Dieu seulement. Les gens qui ont des qualités maléfiques sont arrogants et égoïstes. Ils ne s’inclinent jamais avec amour et déférence. Ils se croient très respectables et spirituels alors qu’ils agissent exactement à l’opposé. Se considérant extrêmement riches et respectables, ils pensent: “Il est impossible de trouver quiconque ou qui que ce soit qui ait toutes mes qualités ni qui ait réussi comme moi.” A cause de leur arrogance et de leur avarice, ils ne se préoccupent de personne d’autre.

Ils ne s’engagent dans des activités religieuses que pour leur renommée et leur gloire, sans se soucier des lois et des règles des écritures, en faisant une mascarade de ferveur religieuse. Leurs vêtements portent des insignes de piété pour montrer aux gens à quel point ils sont religieux. (Voir dans la Bible Matthieu, chapitre 7, versets 15 à 19 et Luc chapitre 11 versets 39 à 47.) Les immenses richesses qu’ils dépensent dans des activités religieuses attisent les flammes de leur ego, de leur vanité et de leur hypocrisie. (Voir la Bhagavad Gita chapitre 9, verset 12.) On fait souvent leur louange pour des motifs intéressés mais, ceux qui les louent savent très bien que l’objet de leurs louanges ne les mérite en rien.

Verset 18

ahamkaaram balam darpam
kaamam krodham cha samshritaaà
maam aatmaparadeheshu
pradvishanto bhyasooyakaaà

Traduction

Adonnés à l’égoïsme, la force brutale, l’arrogance, la luxure et la colère, ces gens malicieux haïssent Ma présence dans leurs propres corps aussi bien que dans le corps des autres.

Interprétation Métaphorique

Ceux qui sont démoniaques par habitude sont constamment égoïstes, fiers de leur force brutale et de leur force animale, arrogants, pleins d’ambition, n’ayant en tête que sexe et colère. Ils profanent leurs corps et leurs vies par leurs mauvaises actions et en torturant les autres. Ils ne croient pas que Dieu existe dans l’homme ni en eux-mêmes. Ces gens-là se croient très intelligents: c’est leur vanité même.

Dans le Shvetashvetara Upanishad (chapitre 6, verset 11) il est dit: eko devaà sarva-bhooteau gooaehaà sarva-vyaapee sarva-bhootaantar-atma karmadhyakshaà sarva-bhootaadhivaasaà saahshee cetaa kevalo nirguoashca. “Il y a un Dieu qui se cache dans tous les êtres, imprégnant tout, le soi intérieur de tous les êtres, ordonnant toutes les actions. Il réside dans tous les êtres en tant que témoin, en tant que connaissance, le seul, démuni de toute qualité.” De même la Bhagavad Gita (chapitre 10, verset 20) déclare: “Je suis l’âme présente dans tous les êtres vivants. Je suis au commencement, au milieu et à la fin.” La Bible (première lettre aux Corinthiens, chapitre 3, versets 16 et 17) déclare également: “Ne savez-vous pas que vous êtes le temple de Dieu, et que l’esprit de Dieu habite en vous? Si quelqu’un détruit le temple de Dieu, Dieu le détruira. Car le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c’est vous.” (Voyez aussi la première lettre aux Corinthiens, chapitre 6, verset 19 et la deuxième lettre aux Corinthiens chapitre 6 verset 16.) Et dans la première lettre aux Corinthiens (chapitre 3, verset 19), la Bible dit: “Car la sagesse de ce monde (l’intelligence matérielle) est folie devant Dieu.”

Ceux qui sont dans l’illusion pensent: “Je suis la somme de tout.” Ils sont extrêmement orgueilleux et vivent selon leurs humeurs maléfiques. Ils ne croient pas au soi qui demeure au dedans. Ils pensent que l’homme n’est né que de relations sexuelles. Ils haïssent les gens spirituels et n’hésitent pas à les critiquer ou même à les torturer. Non seulement ils déshonorent le soi intérieur par leurs activités mauvaises et immorales, mais ils déshonorent aussi Dieu présent dans les autres en les torturant, les insultant, les maltraitant, les contraignant et même en essayant de les tuer. Ils ne se rendent jamais compte que Dieu est en tous, que Dieu est tout en tout, qu’il imprègne tout, que lui seul fait tout. Le Seigneur fit les êtres humains à Sa propre image; puis Lui, la multiplicité de l’être divin, souffla dans les narines de chaque être humain.

Retour au Sommaire

Yoga Sutras de Patanjali

Commentaires de Yogiraj Shri Shri Lahiri Mahasaya
étation Métaphorique de Paramahamasa Prajnanananda
extrait du livre Yoga Sutras de Patanjali à la lumière du Kriya Yoga (titre provisoire), par Lahiri Mahasaya, interprété par Paramahamsa Prajnanananda en consultation avec Paramahamsa Hariharananda.

Sutra 24

klesha karma vipaaka ashayaih aparaamrishtah purusha vishesha ishvarah.

klesha = ignorance ou souffrance;
karma = assujeti au karma ou action;
vipaaka = fruit de l’action;
ashaya = mémoire ou attachement;
aparaamrishtah = non affecté, sans tache;
purusha vishesha = un genre d’être particulier;
ishvarah = le Seigneur.

Traduction

Ishvara (le Seigneur ou Dieu) est un purusha (Être) spécial non affecté par l’ignorance ni la souffrance, non assujetti au karma ni au samskaras ou fruits de l’action et libre de tout attachement.

Commentaires de Lahiri Mahasaya:

Ishvara (le Seigneur) au Kutastha (ajna chakra, le centre de l’âme) est libre de toute souffrance et des fruits des actions prometteuses ou non.

Interprétation Métaphorique: [Les trois Sutras qui suivent contiennent une explication de l’identité du Seigneur.]

Ici, pour la première fois, le Sage Patanjali introduit l’idée du Seigneur (Dieu). Pour en avoir une conception claire, il faut d’abord comprendre la différence fondamentale entre Ishvara et Brahman. Selon l’analyse Védantique, Ishvara est le maître suprême de l’univers: il le crée, le maintient en vie et le détruit. Mais Brahman, l’ultime réalité transcendentale est au delà de cette triple action, l’Unique, libre de tout attribut. Ishvara est Brahman tel qu’il apparaît dans prakriti (la nature créative). Cette idée fondamentale étant bien comprise par le chercheur, le sage clarifie pour lui le concept d’Ishvara.

Le Seigneur n’est pas affecté par les afflictions, les actions, leurs fruits et l’attachement auxquels l’individu ordinaire doit faire face dans la vie terre à terre quotidienne. Les quatre premières qualités ou les quatre premiers attributs associés avec le Seigneur sont les suivants:

1- klesha: klishnanti eeti kleshaah. Les choses qui entraînent la souffrance sont klesha, les afflictions. Il y en a cinq: l’ignorance, le je-isme (l’ego), les attachements (les choses qu’on aime), la haine (les choses qu’on n’aime pas) et le désir de survivre coûte que coûte qui seront expliquées plus loin en détail.

Dans la Sutra 3 du chapitre 2, klesha est la détresse psychologique, les pulsions émotionnelles telles que la peur, l’angoisse, le chagrin, la tristesse la souffrance et la mort. Toutes les choses éphémères engendrent la souffrance. Seule la conscience divine, l’implantation dans le Soi, est l’état de paix et de liberté.

2- Karma (action): Pour simplifier on peut dire que Karma ou action reflète deux fonctions, recevoir et rendre la pareille, donner et prendre. Selon le résultat, l’action peut être caractérisée de prometteuse, non prometteuse ou mitigée. La racine de toute action est le souffle. Celui qui sait que l’art du souffle est l’art de vivre est affranchi de l’impact des actions.

3- Vipaaka (fruit de l’action): Vipachyanta iti vipaaka, ce qui mûrit est le fruit. Les fruits sont le résultat de l’action et se présentent sous forme de plaisir et de souffrance, ce qui sera expliqué en plus grands détails par la suite à la treizième Sutra du chapitre 2.

4- Aashaya (mémoire ou attachement): Aaphala vipaaka chittabhuman sherate iti aashayaah, les germes d’action qui ne sont pas encore arrivés à maturité et qui restent dormants dans le lit des processus mentaux sont appellés aashaya ou mémoire. C’est la semence du karma ou son empreinte dans la mémoire.

Ces quatre aspects de la vie sont clairement visibles dans la vie quotidienne des gens. Celui qui est complètement exempt de ces quatre sortes d’attachements et d’afflictions est Ishvara.

Ishvara ou le Seigneur (Dieu) est décrit comme étant eeshana shila ichlaa maatrena jagad uddharama kshama. Celui qui est capable de protéger ou de libérer la création, c’est à dire celui qui est la cause de la création, de son support et de sa dissolution, à volonté, est le Seigneur Dieu. Ce n’est pas que Dieu ne soit que la cause de la création; Dieu est la création. La création est la multiplicité d’une divinité.

Toutes les afflictions ou les souffrances sont le résultat de l’ignorance. Étant la source de toute la connaissance, le Seigneur est libre de toutes ces limitations. Un individu ordinaire voit la création ou l’univers distinctement séparé de lui ou d’elle, mais dans le Seigneur une telle dichotomie n’existe pas, il n’y a qu’unité. Lorsqu’on perçoit que le Seigneur Omniprésent imprègne tout, il n’y a pas d’action, pas de fruit de l’action et pas d’attachement.

Lorsque l’individu, par la maîtrise de soi et la pratique spirituelle, atteint l’état de réalisation, il ou elle éprouve divinité, l’état de libération, affranchi de tout. Lorsqu’il retombe de cet état, il est possible qu’il soit encore partiellement encombré d’afflictions et d’attachement mais, lorsqu’au cours du déroulement de sa vie, il retourne à cet état répétitivement, il devient capable de rester de plus en plus longtemps dans l’état de liberté réelle.

Dans cette Sutra, le Rishi parle de Purusha vishesh, un être intérieur spécial ou unique. Pour comprendre Purusha, l’être qui demeure au dedans, il faut lire, contempler et comprendre le chapitre 15 de la Gita, où le Seigneur explique ksara, aksara et purushottama, c’est à dire le périssable, l’impérissable et le Soi Suprême.

Purusha – paryaam shete eeti: celui qui réside dans la ville. Ici, au niveau extérieur, la ville est l’univers et, au niveau personnel, le corps. C’est la réalité interne, le dirigeant intérieur. Cet être qui ne participe pas aux actions ni à leurs réactions, ni aux perceptions de souffrance ou de plaisir est Purusha. Celui qui a dépassé tout dualisme et est par conséquent l’intelligence indivisible, au delà de la personnalité ordinaire, est purusha vishesha, un Être Spécial.

Retour au Sommaire